Avant, quand on voulait aller au musée, on cherchait une exposition à voir pas loin de chez soi, ou on préparait carrément un voyage culturel avec un itinéraire artistique précis. Avec le confinement, les seuls sésames dont on ait besoin désormais sont notre ordinateur (ou notre smartphone) et une connexion Internet. Encore faut-il savoir où et quoi chercher. Ça tombe bien, on vous a fait une petite sélection.
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1 – Google Arts & Culture : toiles de maitres et maitre de la Toile
Une exhaustivité mondiale
Le programme Google Arts & Culture éblouit par sa richesse et son inventivité. De quoi vous occuper une bonne partie de l’après-midi. Un puits de connaissances artistiques y est agrégé : plus de 2 000 musées s’y trouvent recensés à travers le monde. On peut découvrir les chefs-d’œuvre du Titien ou de Botticelli enfermés dans les murs de la Galerie des Offices à Florence, mais on peut aussi se promener dans les couloirs du musée Pouchkine de Moscou, faire un tour au musée de la carte postale à Baud, mettre le cap sur le musée Fukuoka au Japon et revenir en France pour s’enfoncer dans la grotte préhistorique de Chauvet. Une offre muséale démesurée, traitée avec un sérieux de conservateur. Chaque œuvre est parfaitement annotée, les images affichent une netteté irréprochable. Le programme de Google propose à l’internaute curieux une qualité digne des beaux livres spécialisés, sans la barrière du prix car tout est en accès libre. Pour ceux qui ne sauraient pas piocher entre les musées présentés, plusieurs entrées sont possibles : période, couleur, thème, artiste, type de support… Tout est fait pour que le visiteur reste sur le site et découvre des toiles, des lieux, des mouvements, ou simplement l’histoire d’une couleur.
L’art comme un jeu
Le programme ne se résume pas à devenir la plus grande encyclopédie d’arts visuels en ligne. Non, Google Arts & Culture a développé une appli (qui fonctionne sur ordinateurs et smartphones) avec laquelle l’internaute va pouvoir s’amuser. Pour les amateurs de puzzle, plus besoin d’avoir une pièce de sa maison dédiée à cet art de patience, l’appli propose des puzzle d’arts en ligne. On reconstitue le Déjeuner sur l’herbe ou les autoportraits de Frida Kahlo depuis son écran, en choisissant son niveau et l’œuvre support. Pour les fans de filtres, une autre fonction permet de mettre son visage dans une œuvre connue en deux manipulations basiques. Tadam, vous êtes la Jeune fille à la Perle, Mona Lisa, Le Cri. On peut aussi faire une chasse au pingouin dans le British Museum, colorier La Vague d’Hokusai avec les couleurs de son choix… bref, les équipes du programme de Google n’ont manqué d’imagination pour rendre l’outil utile et ludique.
https://artsandculture.google.com/
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2 – Dalì, toujours maître de l’illusion
Voilà une pépite existant hors du mastodonte Google, le Théâtre-Musée Dalì de Figueras. Canapé géant en forme de bouche couleur sang, buste monumental ouvrant une porte telle une montagne magique, montres molles et ciels inouïs, l’univers surréaliste de l’artiste espagnol se prête à la déambulation d’une visite virtuelle en 3D. Les couloirs qui se tordent lors d’un virage semblent faire partie intégrante de l’expérience visuelle et sensorielle à laquelle l’œuvre invite. Les objets et images sont dotés de points explicatifs courts quand le curseur s’y attarde. L’information est dispensée avec parcimonie, de manière pertinente et non intrusive. L’expérience-visiteur prime.
Si vous possédez un casque de Réalité Virtuelle, vous pouvez même vivre la visite comme si vous y étiez vraiment. Il est aussi possible de partager certaines salles ou points de vues sur les réseaux sociaux, on peut prendre des mesures d’un point à un autre pour se rendre compte des proportions réelles, et si l’on ne veut pas ou ne sait pas manipuler le curseur, il suffit d’appuyer sur « Lecture » pour faire une visite filmée plus classique. Un peu geek, l’outil reste instinctif et permet de plonger, voire de se perdre, dans le monde onirique de l’homme à la moustache.
https://www.salvador-dali.org/fr/musees/theatre-musee-dali-a-figueres/
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3 – Se réconcilier avec l’art contemporain
Content pour rien ? Si après quelques visites virtuelles du Moma et du Centre Georges Pompidou vous restez sceptique sur l’art contemporain, le FRAC Nouvelle-Aquitaine a concocté quelques courtes vidéos drôles et didactiques à l’usage de tous les curieux, convaincus ou pas. Dans cette mini websérie baptisée « À la conquête de l’art », chaque vidéo pose une question récurrente, que toute personne confrontée à une œuvre s’est déjà posée :
– Une œuvre doit-elle être belle ?
– Une œuvre doit-elle être intouchable ?
– Faut-il être cultivé pour apprécier une œuvre d’art ?
– Faire de l’art demande-t-il du travail ?
On découvre comment l’urinoir « Fontaine » de Marcel Duchamp est devenu une œuvre majeure, pourquoi détruire une œuvre revient parfois au même que d’en créer une. De vraies trouvailles d’archives viennent illustrer des propos clairs, frais, dynamiques et éclairants. Une réussite, car le sujet de l’art contemporain semble toujours aussi ardu et polémique dès qu’il sort du champ de l’entre soi culturel.
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4 – Visites privées dans les musées européens
Et puis bien sûr, il y a Arte. Arte.tv et sa somme colossale de documentaires culturels et web séries tous aussi géniaux les uns que les autres. Pour les beaux-arts, pléthore de documents sont à disposition sur le site de la chaîne et sur YouTube (qui a l’habitude de les héberger quand leur délai de replay expire). Mettons ici en lumière la web série « Seul.e au musée », diffusée à l’occasion du confinement et suite à la triste annulation de la nuit Européenne des Musées. Des conservateurs et conservatrices nous ouvrent les portes des palais dans lesquels ils travaillent et s’arrêtent sur une toile emblématique. Quelques cours succincts d’Histoire de l’art, racontés avec naturel et passion. On ressent un léger froissement au cœur. Nous prend l’envie d’entrer dans l’écran, à la manière des personnages de Woody Allen dans « Le Sortilège du Scorpion de Jade », pour parcourir les musées avec nos propres corps. Mais haut les cœurs, le canapé n’est pas si inconfortable et l’esprit peut encore s’évader sans attestation, alors profitons-en.
Nathalie Troquereau